24 janvier 2019

EHPAD : vers une extension des prérogatives des médecins coordonnateurs


L’article 64 de la LFSS pour 2019 étend les pouvoirs de prescription des médecins coordonnateurs tout en cherchant à les articuler avec ceux des médecins traitants. Un décret doit en préciser les modalités de mise en œuvre. 

Lien loi : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/loi/2018/12/22/2018-1203/jo/texte 

Lors des discussions parlementaires relatives au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2019, les parlementaires ont eu, à l’initiative du Sénat, l’occasion de débattre de la question des prérogatives des médecins coordonnateurs et de leurs articulations avec celles des médecins traitants. Rappelons au préalable que certains établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) ont de grandes difficultés à trouver un médecin coordonnateur faute de candidats. Rappelons également que dans certains EHPAD, le médecin coordonnateur est également médecin traitant de certains résidents. Agissant en tant que médecin coordonnateur, il a des pouvoirs limités de prescription, notamment médicamenteuses. Tel n’est pas le cas lorsqu’il agit en tant que médecin traitant de certains résidents pour lesquels il dispose de la plénitude des pouvoirs de prescription de tout médecin traitant.

De nouvelles prérogatives pour les médecins coordonnateurs

La première disposition introduite par le II de l’article 64 de la LFSS pour 2019 vise à reconnaître dans la loi aux médecins coordonnateurs agissant en tant que tels des pouvoirs de prescription de médicaments et des produits et prestations inscrits sur la liste mentionnée à l’article L. 165-1 du code de la sécurité sociale (dispositifs médicaux à usage individuel, certains produits de santé…). Ce, en articulation avec le médecin traitant et dans des conditions devant être fixées par décret (CASF, art. L. 313-12, V). Actuellement, le médecin coordonnateur agissant en tant que tel ne s’est vu reconnaître par la réglementation que des pouvoirs de prescription limités (CASF, art. D. 312-158).

Le Sénat a voté, en première lecture, contre l’avis du gouvernement, un amendement reconnaissant aux médecins coordonnateurs un pouvoir général de prescription. Après l’échec par 7 députés et 7 sénateurs réunis en Commission mixte paritaire de trouver un accord sur l’ensemble du PLFSS 2019, ce dernier est revenu en discussion devant les députés. En commission des affaires sociales, les députés ont alors choisi de se caler, s’agissant des pouvoirs de prescription des médecins coordonnateurs, sur la position du Sénat, mais c’était sans compter sur le gouvernement. En effet, lors de la nouvelle lecture en séance publique à l’Assemblée Nationale, celui-ci a déposé un amendement visant à limiter la portée de cette évolution. Cet amendement a été voté par les députés et c’est cette version qui figure dans la LFSS publiée au Journal Officiel.

A l’appui de son amendement, le gouvernement a indiqué que « s’il semble nécessaire de leur conférer un pouvoir de prescription plus étendu qu’il ne l’est actuellement, celui-ci doit toutefois être précisément articulé avec celui de médecin traitant. En effet, il ne faut pas mettre à mal la collaboration nécessaire et essentielle entre le médecin coordonnateur et le médecin traitant, auquel les résidents des EHPAD doivent avoir accès comme tout citoyen ». Et la secrétaire d’État Christelle Dubos de poursuivre : « l’amendement du gouvernement vise donc à préciser que l’exercice du droit de prescription du médecin coordonnateur s’exerce en articulation avec celui du médecin traitant, en renvoyant à un décret les modalités d’exercice de ce droit. Ce décret sera élaboré en concertation avec les principaux acteurs. Celle-ci est engagée depuis plusieurs mois, et des pistes de travail ont été identifiées. En outre, il conviendra de tenir compte des travaux sur l’accompagnement des personnes vivant en EHPAD menés dans le cadre de la concertation sur le grand âge et l’autonomie ouverte le 1er octobre dernier ». Répondant à la députée Monique Iborra, la secrétaire d’État a par ailleurs précisé le calendrier de publication et d’entrée en vigueur du décret qui est prévu au premier semestre 2019 (Assemblée Nationale – Compte rendu des débats – séance du 28 novembre 2018). Le Sénat ayant rejeté, en nouvelle lecture, sans débat au fond le PLFSS pour 2019, les députés ont confirmé en ultime lecture le texte qu’il avait adopté précédemment.

Enrichissement de la contractualisation

Par ailleurs, l’article 64 de la LFSS pour 2019 prévoit également que les contrats liant les EHPAD aux professionnels de santé exerçant à titre libéral contiendront des clauses spécifiques dans le cas où le médecin coordonnateur de l’établissement intervient également auprès d’un ou de plusieurs résidents comme médecin traitant. Ces clauses spécifiques porteront notamment sur le mode de rémunération (CASF, art. L. 314-12). A minima, l’arrêté ministériel du 30 décembre 2010 fixant les modèles des contrats types devant être signés « par les professionnels de santé exerçant à titre libéral et intervenant au même titre dans les EHPAD » va devoir être revu et complété pour préciser ces clauses spécifiques. Il est également fort probable que la partie réglementaire du CASF soit également revue avant la modification de cet arrêté.